Anthologies, grandes sagas et expérimentations transmédias : les titres fraîchement publiés sont de qualité et satisfont les goûts les plus divers
Anthologies des dessinateurs italiens, débuts de auteurs célèbres, transpositions de grands romans, sagas classiques du genre science-fiction latino-américain, roman graphique transmédia et expérimental. Les nouveautés comiques de cette dernière semaine se caractérisent par la variété et surtout la qualité.
1. Aucun remords, Soutien juridique, AA. VV.
« Une violation des droits de l’homme d’une ampleur jamais vue en Europe dans l’histoire récente ». C’est ainsi qu’Amnesty International a décrit les événements survenus à Gênes en 2001, il y a 20 ans, à l’occasion de la Sommet du G8. La grande variété de mouvements et d’associations qui s’y sont rassemblés pour exprimer leur dissidence s’est heurtée à une répression policière immédiate et souvent brutale. Une série de jours destinés à rester dans les mémoires – parmi de nombreux épisodes – pour les événements sanglants de l’école Diaz et surtout pour la mort de Carlo Giuliani, tué à l’âge de 23 ans sur la Piazza Alimonda par un coup de feu tiré par les carabiniers. Cette anthologie comique, coordonnée et commentée par Support légal (collectif né en 2004 pour apporter une assistance juridique aux manifestants jugés suite au G8), commémore le vingtième anniversaire de Gênes avec une série de récits, tableaux et illustrations de 36 auteurs parmi lesquels Blu, Daniel Cuello, Claudio Calia, Davide Reviati, Francesco Cattani, Lorena Canottiere, Rita Petruccioli, Maicol & Mirco, Roberto Grossi, Nova, Marco Cazzato. ET Zerocalcare qui, dans un récit autobiographique et près de 50 tableaux inédits, raconte comment il a vécu cette époque en tant que manifestant et témoigne des événements dont il a été témoin (Coconino Press, 240 pp, 20 euros).
2. Hexed 1, par Micheal Alan Nelson, Emma Rios, Dan Mora
Lucifer, à savoir Luci Jenifer Inacio das Neves, est l’un des sorcière spécialisée dans le vol et d’autres missions très spéciales. Qu’il s’agisse de voler les ailes d’un ange dans une boîte de nuit ou d’exorciser un démon en l’emprisonnant dans une poupée en tissu, elle est la meilleure dans son domaine. Dommage qu’elle se retrouve inévitablement dans le pétrin, comme lorsqu’elle se fait chanter par Dietrich, une vieille connaissance à elle (qui lui a volé beaucoup d’argent) qui l’oblige à récupérer un artefact maudit à l’intérieur d’un cadavre infesté par un monstre mortel. Commencez-en un ici nouvelle saga fantaisie urbaine avec juste la bonne quantité de pulpe, des personnages charismatiques et des trouvailles mémorables, illustrés par un trait dynamique de Emma Rios, dessinateur espagnol récompensé comme Meilleur artiste de couverture aux Eisner Awards 2020 (Editions Bd, 112 pp, 18 euros).
3. Le jardin de minuit, par Philippa Pearce, Edith
Tom attend avec impatience un été de solitude, envoyé chez ses oncles lorsque son frère Peter attrape la rougeole. Ici, il doit encore être dans isolation, pour ne pas risquer d’infecter qui que ce soit. Ainsi les jours deviennent trop longs, et la nuit l’horloge qui marque les heures ne le fait pas dormir. Jusqu’à ce que, après les 12 coups de minuit, Tom entende 13 : le signal d’une heure féerique qui fait monter un jardin mystérieux et ensoleillé sur l’arrière (normalement nu) de l’appartement. Les nuits de Tom se transforment en expéditions furtives dans le parc qui surplombe un autre monde et un autre moment, dont les habitants ne peuvent ni voir ni entendre l’enfant intrus. Personne, sauf Hatty : un pair qui sent sa présence et qui deviendra bientôt son nouvel ami. De la célèbre roman pour l’enfance par Philippa Pearce, une adaptation en bande dessinée dont les illustrations sont parfaites pour transporter des lecteurs, comme Tom, dans un jardin enchanté (Mondadori, 108 pp, 18 euros).
4. Chroniques du Moyen Âge, de Juan Zanotto, Emilio Balcarce
Recueillie pour la première fois en un seul volume en édition intégrale, une saga de science-fiction post-apocalyptique revient. Dans un futur lointain, la Terre a été dévastée par le Troisième guerre mondiale. De cette ouverture classique, un kaléidoscope de personnages et de situations originales se déchaîne. Nous faisons la connaissance de Nero, un supercalculateur qui, à cause d’un virus, serait la réincarnation de l’empereur romain du même nom et accuse l’humanité d’avoir mis le feu à Rome, c’est-à-dire le monde. En contraste, c’est le cerveau, un expérience ratée de l’armée, capable de contrôler l’esprit des survivants humains affectés par le rayonnement post-atomique. Une véritable guerre éclate entre les deux, faite de coups, de contre-coups et de coups de génie, à la manière d’une partie d’échecs. Un classique de la bande dessinée qui occupe à juste titre une place de choix dans la riche veine de science-fiction latino-américaine (001 éditions, 280 pp, 24 euros).
5. La magie racontée par une machine, par Niger Lapis, Uochi Toki
Une bande dessinée expérimentale récupérée du monde de autoproductions, signé par Lapis Niger, alias Matteo « Napo » Palma, chanteur du duo rap Uochi Toki. Grâce à une série de plaques en noir et blanc composé de dessins fluides et organiques, on découvre les origines d’un monde : comment le néant est devenu matière, énergie et enfin vie ; comment je dragons, des êtres d’électricité et de pouvoir, et comment ils ont enseigné la magie aux humains avant qu’une guerre inévitable n’éclate entre les deux races. La magie racontée par une machine est un hybride inhabituel d’épopée mythologique, de saga de haute fantaisie et de métaphore de la société moderne. Un mélange qui ne se limite pas aux genres narratifs, mais dépasse la page imprimée pour la faire devenir travail transmédia. Grâce à un QR code, il est en effet possible d’écouter l’histoire racontée par la voix de l’auteur, et accompagnée de la musique de Riccardo « Rico » Gamondi, un autre membre du duo Uochi Toki (Argolibri, 200 pp, 25 euros).